Les différentes sortes d’innovations et leur jugement

Publié le par Oukhtkoum

Les différentes sortes d’innovations et leur jugement



Sachez que l’innovation du point de vue étymologique signifie le fait d’introduire une nouveauté, et du point de vue de la charte islamique, elle concerne tout ce qui a vu le jour pour la première fois, sans que cela ne soit mentionné ni dans le Qur'an, ni dans les ahadiths.

 


Le Cheikh Abdoullah Ibn Sadik Al Ghoummari, Grand Muhadith du Maroc
 

 

 

L’innovation est de deux catégories :

 

- Une mauvaise innovation : celle qui contredit le Qur'an et la sunna.

 

- Une bonne innovation : celle qui est conforme au Qur'an et à la sunna.

 

 

Al-Bayhaki a rapporté selon une chaîne de transmission juste dans son livre intitulé Manakib-Achafi3i que l’Imam Achafi3iy a dit : « Les innovations sont de deux catégories : Les unes concernent les choses qui contredisent le Qur'an, la sunna et l’unanimité des savants sunnites. Ces innovations sont mauvaises. Les autres sont celles qui renferment beaucoup de bien et qui ne contredisent aucunes des sources de législation islamique susmentionnées. Ces innovations ne sont pas à blâmer. »

 

An-Nawawi a rapporté dans son livre intitulé Tahdhibou Al-asma wa Sifat ce qui suit : « L’innovation selon la charte islamique est le fait d’inventer quelque chose qui n’existait pas au temps du prophète, que Dieu élève davantage son grade ; elle est soit bonne, soit mauvaise. »

 

L’imam et le cheikh Abou-Mohammed Abdel Aziz Ibn Abdassalam que Dieu soit clément envers lui, celui qui est unanimement reconnu comme étant un grand savant, a cité dans son livre intitulé Al kawaid ce qui suit :   « L’innovation se subdivise en plusieurs catégories : obligatoire, interdite, recommandée, déconseillée et licite. Ce qui permet de les distinguer est le fait de les soumettre aux règles de la charte islamique. Si l’innovation fait partie :

- des lois obligatoires, alors elle est obligatoire

- des interdits, alors elle est interdite

- des pratiques recommandées, alors elle est recommandée

- des choses licites, alors elle est licite

- des choses déconseillée, alors elle est déconseillée » fin de citation.

 

 

Ibn Abidin a rapporté dans son livre intitulé « Arraddou-lmoukhtar » ce qui suit :

« L’innovation peut être :
- obligatoire lorsqu’il s’agit de répliquer, par des preuves, contre des groupes égarés, ou d’apprendre la grammaire arabe indispensable pour la compréhension des versets du Qur'an et des hadiths du prophète ;

- déconseillée comme le fait de décorer les mosquées.

- licite s’agissant de multiplier les variétés de nourritures et d’habillement. » 

 

Cette subdivision de l’innovation en plusieurs catégories est déduite d’un hadith rapporté par Al-Boukhari et Mouslim et dans lequel 'Aicha, que Dieu l’agrée, a mentionné que le prophète a dit que celui qui innove une chose contredisant la charte islamique, alors son innovation est rejetée.

 

Nous comprenons du Verset 27 de Sourate Al-Hadid (57) : « Nous avons révélé l’Evangile à Jésus et mis dans le cœur de ceux qui le suivirent une grande charité, de la douceur et de la compassion. Toutefois, ils ont innové, par excès de zèle et pour plus de piété, le monachisme que nous ne leur avions pas imposé au départ. Mais ils se l’était imposé pour chercher à gagner l’approbation de Dieu. »

 

Ce verset loue les musulmans de la communauté de Jésus qui avaient la bonne croyance en Dieu et qui avaient innové un monachisme qui consistait à se priver des délices de ce bas monde et à renoncer même à se marier pour pouvoir se consacrer à l’adoration de Dieu. Cet excès de monachisme qui n’était mentionné dans aucun passage de l’évangile authentique ni dans aucune parole du prophète Jésus, ils l’ont choisi pour avoir l’agrément de Dieu. Le fait de se marier les auraient poussés à se préoccuper des devoirs conjugaux et familiaux au dépend des adorations. Ils avaient donc construit des maisons en terre cuite, retirées des agglomérations pour se consacrer pleinement aux adorations.

 

Mouslim a mentionné dans son Sahih, un hadith rapporté par Jarir Ibn Abdillah Al-Bajli dans lequel le Prophète a dit que celui qui innove en islam une bonne innovation, aura sa récompense ainsi que la récompense de ceux qui la mettent en pratiquent sans que cela ne diminue en rien leur récompense. Et celui qui innove en islam une mauvaise innovation, aura le fardeau de son pêché ainsi que de ceux qui la mettent en pratique, sans que cela ne diminue en rien les pêchés de ces derniers.

 

 

Les compagnons du Prophète  qui transcrivaient la révélation que le prophète  recevait, le faisaient sans associer de points aux lettres de l’alphabet arabe. Lorsque Othman Ibn 'Affane transcrivit six livres de Qur'an dont certains furent envoyer à Alafak, à Basora, à la Mecque et dans d’autre villes encore, il en garda une copie dont les lettres de l’alphabet ne comportaient aucun point. Le premier qui prit le soin d’associer des points aux lettres de l’alphabet arabe avait côtoyé certains compagnons du prophète . Il s’appelait Yahya Ibn 'Amr. On trouve dans le livre intitulé Kitab Imasahif écrit par Ibn Abi Dawoud As-Sijistani ce passage « Haroun ibn Moussa a dit : le premier qui associa des points aux lettres de l’alphabet arabe fut Yahya Ibn 'Amr. » Les savants musulmans n’ont émis aucune objection à cela bien que le prophète  n’ait jamais demandé à ses compagnons de le faire. Celui qui dit que tout ce qui a été innové après la mort du prophète  est de l’égarement, alors qu’il commence par supprimer les points des lettres du Qur'an.

 

 

Dans le Sahih al Boukhari, on trouve ce qui suit : « Le premier appel à la prière du vendredi avait lieu, à l’époque du prophète , d’Abou Bakr et de 'Omar, après que l’imam se soit installé sur la chaire. Mais à l’époque du calife 'Othmane, du fait que les musulmans étaient devenus très nombreux, il demanda d’ajouter un troisième appel à la prière du vendredi. »  (voir l'article complet sur le blog ici)

 


La commémoration de la naissance du prophète est une bonne innovation
, qui vit le jour en l’an six cent de l’hégire. Elle fut instauré par le roi de la ville d’Irbil, dénommé Al-Mouthaffar, qui était un homme pieux. Il invita à cette occasion beaucoup de savants dont des traditionalistes et des soufis sincères. Les jurisconsultes musulmans tels que Ibn Hajar Al 'Asqlani et son disciple al Hafith As-Sakhawi ainsi que As-Suyouti approuvèrent à l’unanimité cela. Al Hafith As-Sakhawi a émis comme fatwa que la commémoration de la naissance du prophète  est apparue après le troisième siècle du calendrier de l’hégire et que les musulmans dans toutes les contrées et les grandes métropoles la célèbrent en lisant le Qur'an et en faisant beaucoup d’aumône.
( Note : à ce propos lire le sujet sur le mawlid sur le blog, ici)

 

 

 

La récitation à haute voix de l’invocation en faveur du prophète  a été instaurée après l’an 700 du calendrier le l’hégire. Les gens, avant cette date, se contentaient de la faire à voix basse.

 

L’imam As-Souyouti a dit que la première fois qu’on rajouta la formule « ss-salate wassalam », c’était à l’époque du règne de Al Mansour Hajji ibn al-Achraf Cha'abane ibn Houssayne ibn Nasser Mohammed ibn al Mansour Kalawoune en l’an 791 de l’Hégire. A une époque antérieure, les musulmans, du temps de Salahoudine-Al-Ayyoubi, avaient l’habitude de dire, après chaque appel à la prière de l’aube, « Assalamou 'ala Rssouli-llah ». Et il fut ainsi jusqu’à l’an 767 où Salahoudine-Al-Barlousi ordonna de rajouter: « Assalamou alayka ya Rassoul Allah ». Et en l’an 791 H, il ordonna de le faire après chaque appel à la prière.

 

Al-Hattab al-Maliki a rapporté dans son livre intitulé « Mawahibou-ljalil » ce qui signifie : « As-Ssakhawi a mentionné dans son livre Al kawlou albadi'a : « Les muezzins ont innové l’invocation en faveur du prophète  après chaque appel à la prière, sauf pour celle de l’aube et celle du vendredi. Pour cette dernière, l’invocation est prononcée avant l’appel à la prière, alors qu’ils ne la font pas pour la prière d’al-Maghreb du fait que le temps de cette dernière est très court. Cela fut initié pour la première fois par Nasser Salaheddin Ibn Ayyoub, la veille d’un vendredi lors de la prière d’Al 'Icha. Certaines personnes ont prétendu avoir vu le prophète  dans le rêve leur dire d’ordonner à an-Nasser de dire aux muezzins de faire l’invocation en sa faveur lors de chaque appel à la prière. an-Nasser fut alors très content d’apprendre cela et le mit à exécution. Une divergence ayant apparue autour de cette question était de savoir si cela était licite, recommandé, déconseillé ou interdite. Les partisans du premier jugement se sont référés au verset qui signifie « Faites le bien ». Il est de notoriété publique que le fait de faire l’invocation en faveur du prophète  est une œuvre qui fait bénéficier son auteur de récompenses, surtout que cela s’est transmis de génération en génération en plus de ce qui a été rapporté à propos des invocations faites juste après l’appel à la prière, lors du dernier tiers de la nuit ou à l’approche de l’aube. La vérité est que cela est une bonne innovation. » 

 

La preuve irréfutable que le fait de faire l’invocation en faveur du prophète  après chaque appel à la prière est une bonne innovation, est tirée du hadith suivant « Si vous entendez le muezzin, alors répétez ce qu’il dit » Hadith rapporté par Mouslim.

 Et aussi le hadith « Celui qui se rappelle de moi, qu’il fasse l’invocation en ma faveur. » Hadith rapporté par Al-Hafidh as-Sakhaoui dans son livre intitulé Al- kwlou-lbadi'i.

 

Ce dernier a dit qu’il est recommandé pour le muezzin et celui qui l’écoute de faire l’invocation du prophète  à voix haute ou à voix basse. Si quelqu’un dit « Il n’a pas été rapporté des muezzins du prophète  qu’ils avaient fait l’invocation en sa faveur. » La réponse est que le prophète  n’a pas dit « Ne faites l’invocation en ma faveur qu’à voix basse, et les choses qui n’ont pas été faites à l’époque du prophète  ne sont pas toutes interdites ou déconseillées. Mais la règle est qu’il y ait soit un verset, soit un hadith, soit un effort d’interprétation de la part d’un jurisconsulte (Tel que Malik, Achafiiy, Ahmed, Abou-Hanifa et d’autres) qui le rendent interdit.

 

Il existe d’autres jurisconsultes tels qu’Ibn al Mounthir et Ibn Jarir, ayant la capacité de déduire, à partir des versets ou des hadiths, des jugements par analogie. Le fait de faire l’invocation en faveur du prophète après l’appel à la prière est une bonne innovation qui se perpétue depuis plusieurs siècles et qui a l’assentiment de plusieurs traditionalistes et jurisconsultes tels qu’As-Sakhawi et As-Souyouti.

 

 

 

 

 

 

Les mauvaises innovations :

 

L’innovation est de deux catégories : L’innovation concernant la croyance et celle concernant les pratiques rituelles.

 

L’innovation relative à la croyance est celle qui contredit les préceptes de l’islam comme par exemple :

- Le fait de nier la prédestination : Celui qui l’innova s’appelle Maabad al Jahaniy à Bassora, comme cela a été rapporté dans le Sahih Mouslim. Les partisans de cette secte prétendent, à tort, que Dieu n’a pas prédestiné nos actes involontaires. Certains vont jusqu’à dire que Dieu a prédestiné le bien, mais pas le mal. Ils disent aussi que ceux qui commettent les grands péchés ne sont ni des musulmans ni des mécréants. Ils nient aussi, l’intercession accordée à certains musulmans grands pécheurs et la vision de Dieu par les gens du paradis.

 

 

- L’innovation d’Ajahmiya : Connu aussi sous le nom d’al Jabriyah qui sont les partisans de Jahm Ibn Safwan. Ils prétendent que l’être humain agit sous la contrainte et qu’il n’a point de volonté. Et de rajouter qu’il est comme une plume en l’air, entraînée au gré du vent.

 

 

- L’innovation des Kharidjites : Ceux qui se sont révoltés contre Ali et qui rendent mécréant celui qui commet un grand péché.

 

- L’innovation de ceux qui disent que les événements n’ont pas de début. Cela est contraire à la raison

 

- L’innovation de ceux qui disent qu’il est interdit de chercher la bénédiction par le grade des Prophètes  et des saints après leur mort, ou de leur vivant et en leur absence. L’auteur de cette innovation s’appelle Ahmed Ibn AbdilHamid Ibn Taymiyah Al Harraniy qui vécut lors du septième siècle de l’hégire (Note : ceci est ce qu'on appel le Tawassoul. Voir la rubrique entière consacrée a ce sujet sur le blog, ici)
 

 

Quelques exemples d'actions relevant de la mauvaise innovation :

 

- Le fait d’écrire en abrégé la formule suivants « Que Dieu élève le grade du prophète Mohammed  et protège sa communauté de ce qu’il craint pour elle. »

 

- Le fait de faire l’ablution pulvérale avec un tapis ou un oreiller.

 

- Le fait de déformer la prononciation du nom de Dieu comme cela se produit avec beaucoup qui prétendent pratiquer une voie soufie. Au lieu de dire Allah en articulant bien les lettres, ils disent A ou La ou Ah qui est plutôt une expression d’exclamation.

 

 

Si quelqu’un réplique en disant « N’est-il pas vrai que le prophète  a dit dans un hadith mentionné par Abou Dawoud et rapporté par Al-'Irbad Ibn Sariyah : « Faite attention aux innovations, la plupart des innovations sont mauvaises ». La réponse à cette réplique est que certaines personnes interprètent mot pour mot ce hadith et pensent, à tort, que toutes les innovations sont condamnables. Les mauvaises innovations sont celles qui vont à l’encontre du Qu'ran, de la sunna et du consensus des savants sunnites.

 

L’imam An-Nawawi a rapporté dans son livre intitulé « L’interprétation de sahih Mouslim » ce qui suit : « Dansle hadith (précédemment cité) le mot KOUL (toutes) est une expression générale (âmm) dont le sens est restreind (makhsous). Ce qui est visé ici est que la plupart des innovations sont condamnables.  » Fin de citation.

 

Et An-Nawawi a également subdivisé l’innovation en cinq catégories : obligatoire, recommandé, interdite, déconseillée et licite et ceci fait consensus (unanimité) dans l'école Chafi'ite.

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